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Folie
C'est en rais d'argent que le jour s'efforçe d'adoucir mon visage de pierre. Mais mon âme demeure
désespérément de glace, livrée à tous les tourments dans un hiver sans fin.
J'avais pourtant navigué haut et loin, doublé des caps, franchi des brisants, humé les couleurs de terres
inconnues qui se couvraient d'or quand Phébus terminait sa course.
Et foulant ces îles d'un pas serein, je savourais sans crainte tous les plaisirs, parcourant sans relâche
les territoires de la vie : je riais je pleurais je luttais ou j'aimais, me donnant aux autres comme ils
s'offraient à moi. J'étais riche alors de mes certitudes, mais aussi de mes doutes, car c'est d'un coeur
vaillant que j'empruntais les chemins du hasard.
Mais un jour, venant de quelque continent du passé, surgirent de bien sombres nuées, gagnant à leur
noirceur mes vastes et nobles contrées. Plaines fertiles ou vallons riants se voilèrent de peur, je
n'entendis bientôt plus que l'écho sinistre de mes vilains cris : c'était le bonheur qui fuyait
inexorablement sous les coups de boutoir de ma propre folie.
Adieu, espoirs de conquêtes, horizons précieux, adieu, aussi, nuits étoilées et rêves en partage !
L'angoisse régnait dorénavant en moi comme un monarque sans vertus écrase son valet.
Et c'est depuis qu'en vain, emmuré en mes propres frontières, je livre le dérisoire combat de mes forces
contraires : à ma fontaine tarie je pleure sans larmes les jours lointains
où je m'exposais sans peines à de douces lumières.
Puissent un jour les rais d'argent me venir en aide...
Tags : fontaine, pierre
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Commentaires
Les rais d'argent peuvent aussi s'éveiller au gré de belles rencontres, fussent-elles numériques ! Tu en es la preuve.
Bien à toi.
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Touchant. Belle sensibilité.
Donner vie au trouble, l'hiver finira par prendre fin,
les rais d'argent ne sont pas loin... en toi
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