• Fenêtre

     Une fenêtre impénétrable au regard. Ce n’est qu’en songes que l’azur la traverse.


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  • Ce serait un soir, dans l'été finissant. J'aurais rassemblé quelques affaires, réglé ce qui pouvait l'être, et laissé tout le reste en suspens... puis j'aurais passé un long moment à feuilleter les albums-photo, jeté un ultime regard depuis la fenêtre qui donne sur la rue : les mêmes passants, les mêmes autos garées sur le trottoir, et les derniers feux du jour venant balayer la grisaille des murs.

    Dans la maison, un silence qui en appellerait un autre, celui d'une absence à venir. Et tous ces objets accumulés au fil d'une vie : des meubles, des livres, des bibelots qu'on ne regarde plus, jusqu'à ce coupe-papier que m'avait donné Papa, dont il me disait provenir de l'aluminium d'un Corsair tombé sur les rivages de la mer de Chine. Les photos et les dessins : visages familiers, horizons d'aquarelle. Tant de choses que je serais amené à ne plus fréquenter. Et autant de souvenirs en partance, avec lesquels je finirais par me confondre : les rires, les pleurs, les joies et les peines, et par dessus tout ces petits riens qui font la vie et pour lesquels on n'imagine jamais qu'il y aura une dernière fois.

    Tu les connais tout autant que moi, ils me sont aussi chers que tu peux l'être.

    Le temps pourrait alors commencer son oeuvre, recouvrant tout cela de son voile d'oubli...

     

     

     

     


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  • La fontaine au loup.

     C’est un mince filet d’eau, un éternel murmure dans le chaos du monde. Ici pourtant rien ne semble avoir changé : silhouette contrariée du pin sylvestre, nuances mordorées du lichen sur le gris-bleu des roches, pelouse rase, épilobes et digitales, bruyères ou genêts : même silence, mêmes senteurs profondes.

     Et comme un défi, de la gueule du loup s’écoule, tenace, le fluide brillant : « Courez, marchands de vent, ravagez à vos profits, humiliez, écrasez, dispersez votre petite humanité, épandez votre bêtise sur mes contrées sauvages et mon âme éreintée. Mais contre ma gueule ouverte d’où jaillissent les songes vous ne pourrez rien : mes légendes vous survivront, elles s’épancheront dans le creux de vos tombes, et vos cendres légères s'insinueront jusque dans les failles et les crevasses obscures où je me morfonds, où je vous attends ».


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