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Nous irons, esprits boiteux, égrener la poussière des chemins, partout où le temps est de biais, nous poursuivrons la diagonale du vide, au chant de l’aube, au cri du soir, nous irons dans la glace et le feu, sous les nuées, au soleil du Midi, à l’eau froide des torrents, le long des routes où frémissent les souvenirs, au cœur des villages éteints, aux porches des églises, aux arches vacillantes des ponts.
Nous irons, cœurs défaits, sous la voûte constellée de promesses enfuies, loin des places fortes et des palais perchés, vers ces contrées que protègent les frondaisons, et nous couchant sereins dans les maisons sans portes, à l’antre noire des cavernes, sous le ciel des clairières, nous entendrons sonner l’onde claire des mondes déchus.
Nous irons, épuisant la nuit, lardant le jour de nos lames blanches, délivrés du temps qui aliène, nous les gueux, les nuisibles ou les faibles, nous marcherons sur les vestiges égarés des possibles, nous devancerons les traces invisibles de ceux que nous aurions été, défrichant les voies que de sombres volontés abandonnèrent aux ronces.
Ensemble nous referons les places fourmillantes de vie les ateliers les boutiques les bals et les fêtes, et réduisant les frontières aveugles, nous forgerons le partage nous scellerons la justice universelle nous écrirons la langue confraternelle qui unit le monde.
Et dans les hautes herbes battues par le vent du soir s’abîmera l’horizon glauque des autoroutes et des rond-points, sous les feux ardents de l’espoir pourrira la tôle des zones marchandes, et la terre féconde engloutira les pavillons sans âme.
Foin des cupides qui menèrent le monde, ils s’éteindront dans le pâle souvenir de leurs allants égoïstes !
Nous reprendrons alors le chemin de nos rêves...
Je te revois déjà, toi qui n’es pas, assise à la table où nous aurions tant reçu. A tes côtés une enfant dont la voix claire serait comme fontaine en mon cœur, une enfant aux yeux de jais étincelants dans la douce pénombre. Dans cette maison sans adresse où nulle route ne mène, en son écrin de prêles et de vertes fougères, tu tiendrais ma main.
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J'aurais bien voulu m'étendre à l'ombre légère
des tamaris qui ploient grâciles sous le vent
j'y aurais humé les flagrances de mystère
qui s'étalent inertes sous l'horizon du temps
J'aurais aimé me dissoudre dans l'air fécond
du bien commun qui élabore le partage
j'aurais désiré ta peau que lèche un frisson
dans la bienveillante fraîcheur de murs sans âge
Nous aurions gagné le bruit clair d'une fontaine
regardant sur l'onde nos reflets de jeunesse
ignorant les regrets qui défont les caresses
Mais comment se perdre ou s'aimer quand vient la haine,
mauvais fruit que font murir des coeurs égoïstes ?
Insouciance enfuie en ton nom je lutte, triste.
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bombant le torse il en appelle à la Nation
bannissant la source d'où s'épanchent les rêves
lui le vil fossoyeur qui excave sans trêve
la terre généreuse où luisaient les passions
au nom de ses maîtres il asseoit le projet
qui voit se hisser la bannière de la peur
tandis qu'à ses pieds les pleutres les zélateurs
depuis leurs chambres votent les lois du rejet
there is no alternative : le bel adage
de l'oligarchie dont il sert la cause inique
sacrifiant la jeunesse aux ambitions cyniques
redoutant par dessus tout l'idée du partage
il attise les craintes il endort les consciences
cette Nuit pourtant le peuple entre en résistance
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